Le retour

Titre : LE RETOUR
Auteur : Valérie
Email : valeriec2@wanadoo.fr
Postée le 09.06.00
Spoiler : Requiem
Catégorie : G / MSR
Mots clés : colonisation
Résumé : Mulder revient de son abduction et le cours de sa vie, de celle de Scully et de celle de l’Humanité entière en est perturbée.
Disclaimer : le blabla habituel. Tous les personnages issus de la série sont la propriété de CC.

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Les trois jeunes hommes s’acharnèrent longtemps sur le corps sans réaction puis finirent par se lasser de leur propre violence. Avec dégoût, ils lui crachèrent dessus et l’aspergèrent de leur propre urine, puis après un dernier coup de pied, le laissèrent enfin en paix.

Aucun son n’était sorti de sa bouche tuméfiée. Pas une plainte, pas un gémissement. C’est tout juste s’il ressentait la douleur. Il n’avait rien fait pour se protéger. Il n’en n’avait tout simplement pas la force, ni même la volonté. Des larmes coulèrent sur ses joues crasseuses, faisant apparaître des traces plus claires à travers sa barbe naissante. Il savait qu’il n’aurait pas le réconfort de l’inconscience et tenta de revivre, à travers la stupeur qui submergeait son esprit depuis qu’ILS l’avaient ramené, les jours précédents.

Il avait repris connaissance au milieu d’une forêt, froide et inhospitalière. Il portait un pantalon de toile gris informe et un tee shirt. Tout son corps était engourdi, par le froid et il était comme paralysé. Il n’avait aucune notion du temps, ni même de qui il était. C’est à l’aube que ses muscles endoloris et rigides reprirent un semblant de tonus. Avec beaucoup d’effort, il se mit à ramper contre un arbre et attendit ainsi de longues heures, jusqu’au moment où il put enfin se lever. Un sentier se trouvait à quelques mètres de lui et il progressa dans la forêt, pour atteindre enfin une route.

Il marcha longtemps, s’arrêtant à chaque fois que son corps épuisé le demandait. Il arriva enfin dans une ville et se blottit dans une ruelle sombre. La nuit l’enveloppa à nouveau, mais le sommeil ne vint pas. Ses yeux se fermaient, par pur réflexe, mais il lui était impossible de dormir. Le matin arriva, lugubre, et l’instinct de survie lui commanda de se lever et de continuer sa route.

Il sentait le regard des passants sur lui, mais il était incapable de demander de l’aide. Il ne savait pas quoi faire, son esprit était totalement incapable de trouver la solution qui le sortirait de ce cauchemar. Son estomac affamé réclamait, et il regardait avec envie et dégoût à la fois les étalages de nourriture. Le simple fait de penser à manger lui donnait la nausée, mais il devait se nourrir. Il déroba quelques fruits et les avala rapidement, avant de les vomir quelques instants plus tard.

Sa gorge desséchée le faisait cruellement souffrir. Il souffrait de vertiges qui le faisaient s’effondrer à terre, et il restait ainsi de longues minutes, incapable de trouver la force de se redresser. Il crut compter deux longs jours et deux nuits froides avant que ses agresseurs ne viennent le tourmenter. Dans la ruelle sombre, ces hommes ivres de violence le torturèrent et il crut que la délivrance de cette vie sans espoir était enfin arrivée.

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Ses yeux s’ouvrirent sous l’effet d’une lumière rougeoyante qui heurtait ses prunelles sensibles. Il sentit qu’on le manipulait et qu’on le transportait sans ménagement dans un véhicule. Des hommes le questionnaient, mais aucun son n’arrivait à franchir ses lèvres. Il ferma les yeux, épuisé, et se laissa conduire vers son destin.

Un hôpital. Les sons et les odeurs qu’il entendait et sentait lui étaient familiers. Les conversations se mêlaient sans qu’il puisse comprendre le sens des paroles prononcées. Il sentit une douleur dans son bras gauche et une soudaine angoisse l’envahit, paniquante, lui rappelant des instants dont il n’avait qu’un lointain souvenir. Il se débattit faiblement, mais il était trop faible pour résister. On l’installa sur un brancard et à nouveau il perdit la notion du temps et de l’espace.

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Les Lone Gunmen avaient mis en place depuis trois mois un réseau de surveillance de toutes les entrées dans les hôpitaux. Lorsque les données arrivèrent sur l’un de leurs nombreux ordinateurs, Frohyke se précipita sur le téléphone pour appeler Scully. Ils avaient peut être une piste. Quelques heures seulement après l’appel, les trois hommes et la jeune femme étaient sur place, espérant une fois encore que leur attente ne sera pas déçue.

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Dana se dirigea vers le brancard qu’on avait relégué dans un couloir et souleva légèrement le drap qui recouvrait pratiquement le visage de l’homme qu’on lui avait désigné. Elle prit une profonde inspiration et trouva le courage de diriger son regard vers le blessé. L’homme était allongé sur le côté, replié sur lui même, le visage couvert de crasse et de sang mêlés. Elle releva les mèches qui recouvraient son front et son coeur s’emballa dans sa poitrine. Ses trois amis se portèrent à ses côtés et ils acquiescèrent de la tête. C’était Mulder.

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La colère de Dana monta de façon indescriptible en voyant qu’il gisait là, sans autre soin qu’une perfusion de sérum, depuis plusieurs heures.

- Madame, c’est un sans abri. Il ne semble pas avoir de blessure grave et nous n’avons pas le personnel suffisant pour nous occuper des blessures non urgentes. Il doit ....

- Cet homme est un agent fédéral, docteur... Winnings. Il est porté disparu depuis plusieurs mois. Il a été enlevé dans des circonstances étranges et il DOIT recevoir immédiatement des soins appropriés.

- Il doit d’abord passé à la douche, Agent... Scully. Le médecin jeta un coup d’oeil rapide sur le badge que lui tendait la jeune femme et il pouvait lire la colère dans ses yeux glacés .

- Il est crasseux et nous ne pouvons pas le laisser entrer dans une salle de soins dans cet état.

- Alors montrez moi où je peux le nettoyer. Immédiatement.

Le médecin lui désigna la salle de douche et les Lone Gunmen s’emparèrent du brancard en un instant. Avec précaution, ils aidèrent Mulder à se lever et le nettoyèrent de la crasse et du sang qui souillaient son corps amaigri. Scully était restée à l’extérieur de la pièce et étudiait avec attention les premiers résultats des analyses faites à son arrivée. Elle fronça les sourcils en découvrant la forte anémie et l’augmentation massive des globules blancs.

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Quelques heures plus tard, Mulder était blotti au fond d’un lit d’hôpital, très pâle, immobile, et presque rigide, et toujours silencieux. Il n’avait pas prononcé une seule parole depuis l’arrivée de Scully et de ses amis.

Elle avait exigé divers examens, incluant un scanner cérébral et abdominal, des examens sanguins plus poussés, qui avaient révélés de fortes carences nutritionnelles, en vitamines et en électrolytes. Les scanners étaient revenus normaux, ainsi que l’électroencéphalogramme.

Skinner était arrivé quelques heures plus tard, secoué d’apprendre la réapparition de son agent disparu quelques mois plus tôt. Son état léthargique l’impressionnait plus que les anomalies sanguines qui avaient été découvertes.

Scully et Skinner sortirent de la chambre où Mulder reposait et elle laissa aller sa tête contre le mur, épuisée.

- Pourquoi ne parle t’il pas, Dana ? Que lui arrive t’il ?

- Je ne sais pas. Je ne sais pas s’il ne veut pas parler, ou s’il est trop faible, ou s’il ne ...

Sa voix se brisa et des larmes roulèrent sur ses joues.

Skinner la prit contre elle et la rassura en lui murmurant des mots d’apaisement.

- Chut... Dana... Tout ira bien. Nous l’allons enfin retrouvé... Tout ira bien maintenant. Nous allons le ramener à la maison.

Ils réintégrèrent la chambre et à nouveau, Scully s’approcha du lit et prit la main de Mulder doucement. Il tourna la tête vers elle, mais elle lut dans son regard autant d’étonnement que de peur.

- Mulder je suis là... Ca va aller maintenant... Tu es en sécurité... Aie confiance en moi, je t’en prie. Parle moi. Fais moi un signe...

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Ses pensées s’organisaient difficilement dans son esprit. Des mots lui venaient puis disparaissaient aussitôt, avant qu’il ait pu formulé la moindre phrase. Il savait que la jeune femme était son amie... Il le ressentait au plus profond de son être. Il voulait qu’elle l’aide... Si désespérément. Il se sentait si mal, si seul. Il ne savait plus qui il était, ni même ce qu’il faisait là. Il voulait savoir. Il voulait dormir...

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Scully consulta de nouveau le médecin qui avait pris en charge Mulder. D’un commun accord, ils décidèrent qu’il avait besoin de repos, et que seule une forte dose de somnifères pourrait lui offrir un repos qu’elle pensait nécessaire. Peu de temps après, elle vit Mulder fermer enfin ses paupières, et resta près de lui la nuit entière.

Au petit matin, Mulder ouvrit les yeux et ses pensées, bien qu’encore fortement perturbées, s’organisèrent peu à peu. La jeune femme était toujours près de lui. Il la scruta alors qu’elle dormait et sourit faiblement. Son visage lui était familier. Il était sûr que c’était elle.

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Une main un peu fraîche posée sur son épaule la sortit de son sommeil trop lourd. Elle se frotta les yeux, et un sourire se dessina sur son visage fatigué. Mulder la regardait, ses yeux étaient plus vivants que lors des dernières heures où il était resté immobile et silencieux. D’une voix rauque, presque inaudible, il prononça son nom.

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Il était assis dans son lit maintenant, après que ses vertiges liés à son épuisement se soient dissipés. Une transfusion au creux de son bras lui apportait les globules rouges dont il avait tellement besoin. Scully lui avait raconté les mois passés à le chercher. Brave petit soldat. Elle s’était battue, de toutes ses forces, pour le retrouver... Comme lui il y a plusieurs années... Il observait son visage creusé, les cernes gris qui entouraient ses paupières. Il savait qu’elle n’était pas malade... Non, c’était autre chose. Une chose tellement incroyable, si inimaginable qu’il avait encore du mal à le croire. Elle ne lui en avait pas encore parlé. Elle le croyait encore sans doute trop faible, trop perturbé par le choc de son retour. Mais il savait qu’à l’intérieur de sa chair tendre, un petit être grandissait. Leur enfant...

- Te souviens-tu de quelque chose ? De ton enlèvement ?

Il répondit en soupirant.

- Non... Je n’ai que des sensations, des images qui restent imprimées dans mon esprit, mais rien de très clair... Je ne sais pas combien de temps je suis resté... absent.

- Trois mois, Mulder. Trois très longs mois. Les Lone Gunmen ont été extraordinaires. Ils m’ont soutenu chaque jour, chaque soir. Sans eux, je crois que nous n’aurions pas pu te retrouver si vite.

- Et Skinner ?

- C’est devenu un véritable ami, Mulder. Il a été si proche de moi... Il m’a réconforté à chaque moment de désespoir.

Scully essuya les larmes qui coulaient sans retenue sur son visage. Elle ne savait pas comment lui décrire les jours et les nuits sans lui, la peur au ventre, l’angoisse insupportable de ne pas le revoir.

Elle ne savait pas non plus lui annoncer l’impossible vérité, la nouvelle terrifiante et si délicieuse à la fois qu’elle avait apprise la veille de sa disparition. Elle n’avait pas le courage de lui avouer la sentence qu’avait également révélé ses examens sanguins, cette mort prochaine qui le guettait. Nerveusement épuisée, elle se laissa aller sans retenue à la confusion de ses sentiments.

Il posa une main légère sur son épaule et l’attira contre lui. Elle se blottit contre sa poitrine et ses sanglots décuplèrent, intarissables. Le bonheur de le revoir était terni par l’angoisse de le savoir menacé. Ils restèrent longtemps ainsi, retrouvant des sensations qu’ils pensaient ne plus pouvoir éprouver, jusqu’à ce que Mulder parle enfin. Elle le regarda d’un air incrédule, tenta de le persuader, mais vaincue par sa ténacité, elle finit par se ranger à son avis.

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Il dormait depuis vingt heures. Jamais elle ne l’avait vu dormir ainsi, si longtemps, lui l’insomniaque, le veilleur sans repos. Son visage était reposé, et malgré sa pâleur extrême et ses traits acérés par la minceur, elle retrouvait le visage de l’homme qu’elle avait aimé.

Il avait souri en retrouvant son appartement intact, presque rit en voyant les trois poissons rouges, bien vivants, bien nourris. Immédiatement après son arrivée, malgré l’épuisement trahi par ses gestes lents, il s’était installé devant son ordinateur et envoyé plusieurs e-mails. Scully n’avait pas posé de questions, il lui avait juste demandé de lui faire confiance, et de l’aider à sortir de l’hôpital malgré son état de santé plus que précaire.

A bout de forces, il avait fini par s’allonger sur le lit et s’était endormi instantanément, d’un sommeil lourd. Elle était restée près de lui, insatiable, avide de sa présence, incapable de ne pas le toucher, de l’effleurer sans perturber son repos.

Lorsque enfin il s’était réveillé, son regard avait plongé dans le sien et elle avait pu lire tout l’amour et la tendresse qu’il lui portait. Lentement, leurs corps s’étaient retrouvés, presque avec timidité, puis leurs désirs enflammés par des mois d’absence avaient consumé toute l’énergie qui leur restait.

Les yeux dans les yeux, Scully sut qu’il était temps de lui parler.

- Fox... Je suis enceinte.

- Je sais.

Elle le regarda avec saisissement.

- Comment peux-tu... Je l’ai appris le lendemain de ta disparition.

- Je le sais, c’est tout. Je sais ce que tu penses, je sais ce que tu vas dire avant même que tu prononces les paroles... Et c’est ainsi pour toutes les personnes que je côtoie. J’ai appris à maîtriser le pouvoir qui m’avait été donné la première fois. ILS me l’ont appris.

- C’est douloureux ?

- Non... C’est puissant... C’est gênant... quelquefois. C’est merveilleux, surtout avec toi. Je suis en totale symbiose avec toi. Avec notre enfant.

- Je ne peux pas le croire... C’est tellement...

- Crois moi, Dana. Aie confiance en moi.

- Tu sais alors pour ta maladie... C’est une sorte de leucémie, Mulder. Je ne comprends pas pourquoi tu as voulu sortir de l’hôpital. Ils auraient pu te proposer un traitement...

Il l’arrêta en posant ses doigts sur ses lèvres humides.

- Aucun traitement humain ne pourra me sauver, Dana. J’ai accepté les conséquences au moment même où ILS m’ont proposé ma mission. J’ai une chance que d’autres n’auront pas. Cet enfant qui grandit en toi... Il sera ma survie. Si je tiens jusqu’à sa naissance... J’ai une mission à accomplir, Dana. Je trouverais la force de survivre. Certains abductés n’ont pas trouvé la force d’accepter ce qu’ILS leur demandaient. Ils sont revenus, sains et saufs. Ils n’auront pas de souvenirs, pas de séquelles. Ils seront comme la multitude quand le Moment arrivera. Mais nous, Scully... Nous saurons quoi faire. Et nous survivrons...

- Quelle est ta mission ?

- Je dois contacter les grands de ce monde, Scully. Je dois les mettre en état d’alerte. Je dois les persuader de réagir avant qu’il ne soit trop tard. Ma tâche sera difficile, et j’espère que j’aurais la force de la mener à bien. J’aurais besoin de toute ta volonté, de tout ton amour. C’est une tâche immense, et presque désespérée.

Il ferma les yeux, épuisé. Scully refoula les larmes qui menaçaient ses yeux et respira profondément. Il fallait qu’elle soit forte. Pour eux deux... Pour eux trois.

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Lorsque enfin Mulder eut récupéré du traumatisme de son retour, il réunit Skinner et les Lone Gunmen, car il savait qu’il aurait besoin d’eux pour mener à bien la tâche qui l’attendait. Scully, encore sous le choc, l’entendit détailler les plans des Rebelles qui l’avait choisi pour mener à bien sa mission.

- Dans chaque gouvernement des grands pays industrialisés du monde, des gens travaillent dans l’ombre depuis des années. Des personnes influentes, la plupart dans l’intimité des chefs d’état. Ces personnes n’attendent qu’un mot, la visite de celui qui va déclencher ce pourquoi ils œuvrent depuis tant d’années. Je sais qui contacter et je suis la preuve dont ils ont besoin pour commencer.
Dans chaque pays, ils vont rassembler les meilleurs hommes dans tous les domaines. Scientifique, médical, mais aussi des gens de la terre, des femmes et des enfants. Tous ces gens ont été préparé, dans le plus grand secret, à répondre à l’appel un jour ou l’autre. Ils seront conduits dans un Abri, construit depuis des années, qui est prêt à les recevoir. Ces gens survivront. Lorsque ILS déclencheront leur offensive, une partie du monde, la meilleure, celle apte à recommencer un nouveau monde, sera en sécurité.

Les Rebelles, ceux qui m’ont enlevés, ne sont pas de taille à résister à LEURS forces. C’est pourquoi ils ont mis en oeuvre ce programme de survie. Et dans chaque abri, Scully, des femmes, comme toi, mettront au monde des enfants capables de donner l’immunité à chaque homme, femme et enfant. Ils feront de la nouvelle Humanité des êtres capables de résister.

Mulder s’arrêta un instant de parler, et scruta les visages des hommes qui l’entouraient. Le visage de Skinner était blanc comme neige, et il sentait que les Lone Gunmen se posaient des multitudes de questions. Scully était restée près de lui, une main posée sur son épaule, l’autre délicatement contre son ventre à peine arrondi. Le regard qu’elle lui lança l’assura de son absolue confiance.

Mulder reprit, la voix cassée par l’émotion qui commençait à le submerger. A mesure qu’il expliquait les projets démentiels des forces de l’ombre, il mesurait l’étendue du désastre qui menaçait la planète.

- Des millions d’hommes et femmes mourront. Et nous n’en sauverons qu’une infime partie. C’est le prix à payer pour que l’Humanité renaisse. Je vais avoir besoin de vous, mes amis. Mon corps va s’affaiblir à mesure que les jours et les semaines passeront. Je vais devoir voyager, en Europe, en Asie. Scully ne pourra m’accompagner qu’un temps. Ensuite j’aurais besoin de vous à mes côtés, pour m’aider à trouver la force de continuer. Je sais ce qui m’attend. Mon corps va se dégrader, mais mon esprit restera intact. Je sais que je pourrais compter sur vous.

Je sais aussi si vous vous demandez si vous ferez partie des élus qui seront préservés. Je peux vous l’assurer. Mais il faudra tenter de ne pas penser à vos proches, à vos familles. Tous ne seront pas sauvés. Je sais que ce doit être dur... Je ressens votre douleur. Au plus profond de moi. Il ferma les yeux, et une vague de souffrance l’envahit. Il la refoula avec force et lut le courage et la détermination dans l’âme de ses amis, et y puisa l’énergie dont il avait besoin.

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Ils partirent huit jours plus tard. Skinner donna sa démission du FBI le lendemain de leur rencontre. Il tenait à être près de Mulder et de Scully pendant ces mois difficiles. Il avait pour Dana des sentiments presque paternels. Il avait partagé tant de choses avec elle depuis l’enlèvement de Mulder, tant d’émotions... Il était près d’elle lors de la première échographie, il avait été à ses côtés lors de l’amniocentèse qui avait révélée la paternité de Mulder. Il connaissait maintenant le but de sa vie.

Leur périple débuta en Asie, où ils rencontrèrent un homme qui changea véritablement le cours déjà chaotique de leurs singulières destinées. Un homme qui les initia à la méditation et au Bouddhisme, qui leur permit de trouver en eux les forces nécessaires à leur difficile cheminement. Un homme riche et puissant mettant à leur disposition sa fortune et un jet privé qui leur permit de continuer leur route plus facilement.

Mulder rencontrait dans chaque pays des hommes acquis à la Cause. Il vérifiait simplement, par ses pouvoirs psychiques incroyables, leur crédibilité. Jamais il ne fut déçu. Les Rebelles avaient minutieusement préparé le terrain. Il rencontra quelques futurs Élus, et admira leur abnégation et leur humilité.

Scully était la preuve vivante de l’Espoir qui allait renaître. Son ventre s’arrondissait doucement alors que l’état de Mulder se dégradait lentement. Le fardeau qui pesait sur ses épaules accentuait plus encore sa déchéance physique. Alors que son esprit accumulait des sommes de connaissance que jamais il n’aurait imaginer pouvoir acquérir, la fatigue se faisait plus intense, presque insurmontable. Un grand maître chinois de l’acupuncture le soulagea quelques semaines, mais bientôt il ne tint debout que quelques heures par jour, épuisé.

Après l’Asie vint l’Europe. Scully, enceinte de six mois, ne put l’accompagner. Leurs adieux furent difficiles. Elle avait peur qu’il ne puisse aller au bout de sa mission. Il partit donc avec Skinner, pour Londres, Berlin et enfin Paris.

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Les couloirs de l’hôpital étaient sombres et silencieux au crépuscule. Skinner s’approcha de la porte d’une chambre et l’ouvrit doucement. Son coeur se serra en voyant son ami, maigre et pale, et frissonna en sentant la fraîcheur lui tomber sur les épaules. Il s’approcha de lui et posa sa main sur son épaule nue.

Mulder ouvrit faiblement les yeux. Malgré la faible lueur du jour, ils brillaient d’un éclat intense. Il lui sourit et inspira profondément l’oxygène apporté par la sonde nasale.

- Comment vous sentez vous, Fox ?

- Un peu mieux... Combien de temps suis-je resté inconscient ?

- Plus de douze heures. J’ai dû batailler ferme contre les médecins. Ils voulaient à tout prix démarrer une chimiothérapie intensive. J’ai réussi à leur faire admettre que des antibiotiques feraient tout aussi bien l’affaire. Cela semble vous avoir réussi un peu. Vous avez meilleure mine qu’il y a quelques heures.

Skinner s’assit sur l’inconfortable chaise en plastique bleu qui se trouvait près du lit de son ami. En quelques secondes, les images de Mulder s’effondrant devant un haut dignitaire français lui revinrent en mémoire. Les convulsions qui suivirent furent interminables, et seule l’intervention rapide des secours permit qu’il s’en tire sans trop de dommage. Sa température était montée à 41°3 et les médecins durent employer l’usage d’une couverture réfrigérante pour le stabiliser. Les radios pulmonaires montrèrent une pneumopathie bilatérale massive, et les taux inquiétants de leucocytes et de globules rouges firent paniquer l’équipe médicale de l’hôpital Américain qui avait pris en charge Mulder.

- Je crois qu’il est temps de rentrer à la maison.

Skinner avait prononcé ces mots d’une voix grave. Il savait pertinemment que son compagnon de route n’était plus en état de continuer. Il savait aussi que d’autres prendraient le relais, et qu’il avait enfin droit au repos de l’âme et du corps.

Mulder le regarda longuement dans les yeux, et lut dans son âme une tendresse qui le fit presque sourire. Skinner était devenu en quelques mois son ami, et même plus encore. La figure paternelle dont il avait toujours été dépourvu, un modèle et un repère de droiture et de fidélité. Il ferma les yeux, épuisé, et d’un hochement de tête accepta la proposition de Skinner.

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Scully attendait depuis près de une heure, les mains posés sur son ventre rond, sentant avec volupté les mouvements de son enfant. Elle attendait ce moment avec inquiétude et joie, sachant que Mulder ne serait pas l’homme qu’elle avait quitté. Elle l’avait vu, quelques jours plus tôt, par l’intermédiaire de la webcam dont ils s’étaient équipés mutuellement, et l’intensité de son regard était gravé dans son esprit. Son coeur s’était figé en voyant les joues creusées par la fatigue, les lignes acérées de son visage.

Mais elle ne s’attendait pas à autre chose. Il fallait qu’elle surmonte son angoisse de le voir ainsi, aux portes de la mort, et qu’elle se réjouisse de le retrouver enfin, pour l’entourer, l’aider à continuer son combat contre le temps. Elle serait à terme dans quelques semaines.

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L’Ordre arriva quelques jours après le retour de Mulder. En trois jours, les Désignés gagnèrent leurs Abris, partout sur la planète, sans état d’âme. Le Moment était proche, et il n’y avait rien d’autre à faire qu’à attendre l’Assault.

Les Abris étaient magnifiquement conçus. Spacieux et clairs, ils avaient été construit comme les bases d’une nouvelle civilisation, dans des endroits reculés, à l’abri dans des montagnes ou sur des îles lointaines.

Les équipements étaient à la pointe de la technologie et les hommes se mirent au travail immédiatement. Ils devaient pouvoir vivre en totale autarcie pendant des mois, voire des années entières.

Scully aimait se promener le long de la plage artificielle qui bordait le bord de l’Abri. Une mer synthétique, parfaite imitation de l’océan, venait mourir sur la plage immaculée. Malgré la densité de population qui vivait dans l’Abri, c’était un endroit qui restait relativement désert et elle goûtait à ce semblant de solitude.

Une jeune femme très blonde, le ventre aussi épanoui que le sien, s’approcha d’elle lentement. Leurs regards se croisèrent un instant et la surprise se lut dans leurs yeux.

- Marita...

- Bonjour, Dana. Je savais que vous étiez là...

Elle désigna son ventre rayonnant.

- Vous êtes à terme dans dix jours, n’est-ce-pas ?

- Oui... Comme toutes les autres femmes enceintes ici... Ca a été un choc lorsque j’ai découvert cela...

La voix de Marita était grave et profonde lorsqu’elle répondit à Scully.

- Nous portons l’espoir de l’Humanité, Dana.

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Scully hurla de douleur à la contraction suivante, mais elle fixa avec détermination les yeux de Mulder et y puisa la force de pousser son enfant vers la vie. Dans un moment presque irréel, elle vit les mains de l’homme qu’elle aimait soulever l’enfant et le déposer sur sa peau nue. Elle respira avec avidité la petite chose vagissante qui cherchait avec impatience son mamelon tendu et ferma les yeux, épuisée par l’effort qu’elle venait de fournir. Elle s’endormit quelques instants après la délivrance.

Lorsqu’elle se réveilla quelques heures plus tard, sa mère et Walter étaient près d’elle, mais elle vit avec inquiétude que le berceau de l’enfant était vide. Elle chercha Mulder du regard et Maggie posa une main rassurante sur son épaule.

- Il a besoin d’elle quelques heures. Tout va bien, Dana. Il faut avoir confiance.

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Il parcourut les couloirs de l’Abri jusqu’à la grande Profondeur et se retrouva dans une petite chambre blanche simplement meublée d’un lit blanc et d’un berceau aux traits purs. Il y posa l’enfant endormi, retira ses vêtements et repris sa fille contre sa peau nue. Il s’allongea doucement sur le lit, l’enfant blottie contre lui et vida son esprit. Une brume légère inonda la pièce et il se laissa aller à la douceur du moment.

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Depuis des mois, depuis son retour, il n’avait senti en lui une telle force, un tel bien être. Il ouvrit les yeux doucement, et la mémoire des heures précédentes lui revint. La naissance de son enfant. La joie de la sentir, vivante, contre lui. Puis le long cheminement vers la lumière. L’enfant était éveillée dans le berceau, et son regard rencontra le sien. Il sourit au déferlement de sensations qui envahissait son esprit. Elle était la Vie. Elle était la Lumière. Elle était celle qui lui redonnait la vie.

Il se leva, incroyablement surpris de ne plus sentir cette fatigue qui ne le quittait plus, de sentir son corps à nouveau vivant et fort. Il sentait le sang pulser dans ses veines, son coeur battre, ses muscles fonctionner. Il avait toujours eu confiance en eux et ILS n’avaient pas menti. Elle était son avenir.

Avec amour, il souleva l’enfant et la prit dans ses bras, puis quitta la pièce et remonta lentement dans les Niveaux supérieurs. Il s’arrêta un instant sur la Plage et présenta son enfant, les bras tendus, à l’immensité.

- Léah...



FIN



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