Paper Heart


Titre : Paper Heart
Auteur : Valérie
Émail : valeriec2@wanadoo.fr
Catégorie : MulderAngst
Spoiler : voir le titre
Résumé : Et si Roche avait réellement assassiné Samantha ?

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Je sors du laboratoire le coeur au bord des lèvres, les jambes défaillantes. Je ne peux pas le croire. Skinner ferme la porte derrière moi et pose une main réconfortante sur mon épaule. Sa voix est triste et je le sais véritablement concerné.

- Ca va aller, Scully ?

- Oui... C’est tellement... inimaginable.

- Je peux aller lui annoncer, si vous voulez.

- Non... C’est à moi de le faire. Je n’ai pas le droit de faillir à mon devoir.

- Comme vous voudrez. Je vous accompagne.

Les couloirs à notre bureau me semblent terriblement longs. Je croise des gens qui me sourient ou me font un signe de tête, mais je suis incapable de répondre. Ma gorge est si serrée que je ne peux plus avaler ma salive.

Nous nous arrêtons devant la porte du bureau. Skinner me lance un regard triste et me demande une nouvelle fois si je veux qu’il reste avec moi pour lui annoncer.

- Merci, Monsieur. Je pense que vous devriez simplement préparer un arrêt de travail pour l’agent Mulder. Il aura besoin de temps.

Il hoche la tête et remonte les escaliers. Je suis seule maintenant. Avec cette responsabilité terrible.

J’ouvre doucement la porte et me dirige vers Mulder. Il est assis devant le bureau, le regard fixe, les yeux secs. Il est effrayant de pâleur, épuisé par ces derniers jours et plusieurs nuits sans sommeil. Je sais également qu’il n’a rien avalé de consistant depuis la découverte du premier corps, focalisé sur l’affaire, incapable de penser au moindre détail matériel. J’ai du plusieurs fois lui mettre un sandwich dans la main pour qu’il l’avale sans même y penser.

Je fais quelques pas vers lui et j’ai presque peur d’affronter son regard.

- C’est Samantha, Mulder. Je suis désolée.

Ma voix s’est brisée en prononçant ces derniers mots. J’ai l’impression de formuler une sentence de mort. Je m’avance vers lui et pose ma main sur son épaule. Il reste immobile pendant un temps interminable, puis soudain son corps entier se met à trembler. Je ressens les ressauts de sanglots silencieux qui secouent ses épaules, puis son visage se décompose brutalement en un masque de détresse absolue. Ses yeux se remplissent de larmes brûlantes qui coulent sur ses joues.

Je l’attire contre moi et je pose sa tête contre mon ventre, et l’entoure de mes bras.

- Scully...

Je lui murmure des mots d’apaisement à l’oreille, me penchant vers lui, caressant ses cheveux lourds et soyeux, mais je sais qu’aucun mot, qu’aucune parole ne peuvent actuellement le consoler. Je le prends dans mes bras et le berce doucement comme un enfant triste.

- Mulder, je t’emmène chez toi. Il faut que tu reposes.

Ses tremblements se sont accentués et il me presse contre lui comme un animal effrayé. Je prends son visage dans mes mains et je l’oblige à me regarder. Sa lèvre inférieure tremble, et ses yeux sont comme deux perles aux reflets changeants, si désespérés.

Je l’aide à se lever et je pose un baiser léger sur son front, puis sur sa joue humide et chaude. Mes lèvres goûtent ses larmes. Sans un mot, je lui tends son manteau puis glisse ma main dans la sienne. Il me suit dans les couloirs menant au parking, silencieux, absorbé par sa douleur.

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Il est perdu. Littéralement. Je le regarde déambuler dans son couloir, incapable de reconnaître la porte de son appartement. Il a perdu tous ses repères. Je le pousse gentiment dans la bonne direction et ouvre la porte. Il entre dans le couloir puis reste immobile, ses bras croisés enserrant ses épaules, tremblant, les yeux mi-clos. Il est maintenant en état de choc et il faut que je le mette au lit le plus rapidement possible. Je n’ai jamais vécu une situation pareille. Je ne suis pas psychologue. Je m’en remets à mon instinct. Je ne peux pas supporter de le voir ainsi, de voir son regard vide, ses lèvres qui murmurent des mots sans suite, la douleur dans son regard, ses sanglots silencieux. Je ne l’ai jamais vu ainsi, aussi meurtri, aussi désespéré et j’ai peur de le perdre à jamais. J’ai peur qu’il se perde dans cet abîme de désespoir.

Il est comme une poupée de chiffon, complètement aréactif. J’essaye de lui parler mais il ne me répond plus, il est ailleurs. Il ne me regarde même pas alors que je l’entraîne vers sa chambre.

Devant son lit, il reste sans bouger, rigide, mais son corps tremble de plus belle, il est semblable à un enfant fiévreux. J’ai du mal à retenir mes larmes devant lui, car je ne dois pas aggraver sa détresse.

J’ôte le dessus de lit et ouvre les draps frais, mais je cherche du regard une autre couverture. Il va avoir besoin de chaleur, et le drap léger n’est pas suffisant. J’ouvre ses placards, ressentant une certaine gêne pour mon intrusion dans ses affaires personnelles, mais il ne me voit même pas faire. Il n’a pas bougé depuis que nous sommes entrés dans la chambre. Je dépose la chaude couverture sur le lit et commence à le déshabiller, l’effleurant à peine. Sa respiration est rapide et irrégulière, et des frissons parcourent son corps glacé. J’ôte délicatement sa chemise, puis dégrafe son pantalon. J’ai honte de mes pensées, mais je prends presque du plaisir à faire ces gestes. Je sais pourtant que lui ne ressent rien. Ses habits s’accumulent sur la moquette. Des larmes silencieuses coulent de nouveau sur ses joues et je les essuies avec le revers de ma main. Lorsqu’il est enfin en sous vêtement, je le guide vers le lit défait. Il roule en boule, le menton contre les genoux, et commence à se balancer doucement.

Je le recouvre de la chaude couverture mais j’entends sa voix rauque murmurer comme une prière. Je penche vers lui et ses paroles me parviennent et me touchent au plus profond de moi même. Il me demande de rester près de lui. Il m’attire sur le lit, et son bras qui m’enserre contre lui. J’ai l’impression d’être ce dont il a le plus besoin au monde.

Ses mains cherchent les miennes et je sens sa chaude respiration contre moi. Je me tourne délicatement vers lui et plonge mon regard dans le sien. Je suis son repère, sa seule chance de ne pas sombrer dans le désespoir le plus profond. Il s’accroche à moi comme à une bouée, et les sanglots reprennent, plus forts, si forts. Je le serre dans mes bras.

- J’ai si mal, Scully... J’ai si mal...

- Je sais, Mulder. Je suis là.

Je lui dépose de petits baisers légers sur le visage, puis ma bouche descend dans sa nuque chaude et douce, vers la naissance de ses épaules. Sa peau est douce et je sens ses mains progressivement répondre à mes baisers. Elles parcourent mon corps, tremblantes et légères. Des frissons me parcourent. Je me dégage doucement pour ôter ma veste et son regard soudain se fige, sa respiration s’accélère et je sens l’angoisse dans ses yeux. Mais bientôt je me glisse contre lui, et ses mains à nouveau cherchent à découvrir mon corps. Il me caresse timidement, et je lui ouvre mon chemisier. Je ne quitte pas ses yeux mi-clos, cherchant dans ses prunelles humides une lueur d’espoir. Ses mains sur mes seins me brûlent et je ferme les yeux de désir. Nos caresses se font plus précises, nos respirations se mêlent.

Mais des larmes coulent à nouveau sur ses joues et les sanglots le reprennent, plus forts encore.

Sa voix n’est plus qu’un murmure rauque.

- Je suis si fatigué... Scully.

J’embrasse ses lèvres pleines. Il est épuisé de douleur. J’esquisse doucement un retrait sans le quitter du regard.

- Ne me quitte pas, Scully.

- Je reviens tout de suite.

Mes jambes me portent à peine alors que je me dirige vers la salle de bains. Je fouille dans son armoire de toilette et je reviens vers lui, un verre d’eau à la main. Il a les yeux à demi-ouvert, et son regard est perdu vers le plafond. Je lui prends la main et l’aide à se redresser, puis lui tend deux comprimés de somnifères.

- Il faut que tu dormes. Prends ça.

Sans un mot, il avale les pilules, les yeux fermés, puis se glisse de nouveau dans les draps froissés, le corps parcouru de frissons. Son visage se détend lorsque il sent que je m’allonge contre lui. Nos deux corps se lovent l’un contre l’autre et je le sens se détendre rapidement. Sa respiration se fait plus lente, mais à nouveau des spasmes de sanglots le secouent. Quelques dizaines de minutes plus tard, il dort enfin. Je caresse doucement son visage ruiné par le chagrin et les larmes et je laisse mes pensées s’évader. Que signifient nos gestes ? J’ai aimé ce que nous avons fait, nos caresses, nos baisers. Je les attendais depuis si longtemps. Mais pour Mulder ? Ne serait-ce pas simplement le moyen de ne pas sombrer totalement ? Il a besoin de moi. Il a besoin de moi. Besoin... Je suis là pour le consoler, mais ensuite ? Il a besoin d’être aimé, de se sentir moins seul. Il a été seul si longtemps.

Pour moi c’est autre chose. Pour moi il est l’être sans lequel ma vie serait plus sombre. J’aime sa présence, j’aime son humour, son intelligence, sa vivacité d’esprit. J’aime quand il me regarde, quand il m’effleure, si souvent, si peu... J’aime son allure, j’aime ses yeux, ses lèvres...

Je l’aime... et il a besoin de moi.

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J’ouvre doucement les volets de la chambre. Il dort encore. Il dort depuis douze heures, terrassé par l’épuisement et les somnifères. Je laisse un instant le rayon de soleil caresser son visage. Les traces de larmes forment des sillons sous ses paupières gonflées. Je caresse délicatement ses cheveux en désordre, relevant une mèche de son front. Un frémissement parcoure ses paupières qui s’ouvrent doucement. Je lui souris tendrement. Il me répond par un sourire triste.

- Elle est vraiment partie, n’est ce pas ?

Je hoche la tête sans un mot. Son sourire s’efface et dans ses yeux je peux lire un tel désespoir que je sens mes yeux se noyer de larmes.

Sa voix est rauque.

- Je croyais... J’espérais que j’avais fait un cauchemar...

- Non, Mulder. J’ai tellement de peine pour toi.

- Je sais, Scully. Hier j’étais si... perdu que je crois que j’ai perdu un peu les pédales, non ?

- Tu avais besoin d’avoir quelqu’un auprès de toi, Mulder. J’étais là.

- Oui, mais...

- Ne dis rien.

Je pose mes doigts sur ses lèvres gonflées par les pleurs de la veille. Il prend ma main et m’embrasse doucement mais je vois dans ses yeux que rien n’a changé. Je suis toujours son amie, je suis toujours l’épaule sur laquelle il peut craquer. Il faut que je me résolve à cette situation.

Nous restons longtemps ainsi, les yeux dans les yeux, puis je quitte la chambre lentement. Il va falloir qu’il apprenne à vivre sans elle, à chérir les souvenirs qui lui restent de son enfance. Il faudra qu’il fasse son travail de deuil, comme si elle était morte hier. Il faudra qu’il trouve en lui la force de vivre a quête qui a guidée sa vie depuis tant d’années.

Je serais là pour lui. Toujours.

FIN

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